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"NUCLEAR DEVICE : 45 révolutions par minute" : chronique

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Message  GUIBERT FRANCOIS Dim 8 Nov - 1:54

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Nouvelle page spéciale


« Chronique détaillée du livre

“NUCLEAR DEVICE (1982/1989) :

45 révolutions par minute

— Histoire d'un groupe rock alternatif” »



en ligne sur ce lien :
http://lachanteusemariefrance.fr.gd/Chronique-detaillee-du-livre--g-NUCLEAR-DEVICE--k1-1982-a-1989-k2---d--45-revolutions-par-minute%2C-histoire-d-h-un-groupe-rock-alternatif-g---k1-de-Daniel-Paris-Clavel-%2B-Patrick--g-Kiox-g--Carde-%2B-Nuclear-Device%2C-aux-Editions-Libertalia-k2--.-.htm


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Chronique du livre

“NUCLEAR DEVICE (1982/1989) : 45 révolutions par minute – Histoire d’un groupe rock alternatif”


(Éditions Libertalia, 170 pages. 25 €. Incluant un CD bonus de vingt titres)
:

Nuclear Device — appelé aussi ND — fait partie des premiers groupes français (1) des années 1980 à avoir mélangé rock, reggae, dub, énergie punk. Mâtinés de phrases (parfois couplets ou refrains entiers) en espagnol lycéen de cuisine, les textes sont intelligents, “concernés” et en français.

Le tout avec une flashante identité visuelle vocale et musicale. Celle-ci est à la fois inspirée de The Clash et totalement personnelle. Dans ses chansons comme dans son imagerie, ND a un sens aigu, accrocheur et percutant de l’esthétisme révolutionnaire.

Pourtant, de 1990 à 2015, les ND demeurent un groupe mal connu, souvent mis de côté, ignoré même, dans le rock d’ici. Que ce soit dans les interviews de la nouvelle génération (qui semble n’avoir jamais entendu parler de ND) ou dans les livres “d’histoire” de la musique électrique rebelle.

Le livre “Nuclear Device 1982/1982 : 45 révolutions par minute – Histoire d’un groupe rock alternatif” remet à l’honneurle parcours de ce groupe.

De manière concrète et captivante, il retrace le vécu de Pascal Carde (chant), son frère Patrick Carde (guitares de 1982 à 1988), Chema (guitares 1988/1989), Chris Maresco (batterie), Charlu (basse), Jean-Marc Odiot (sax). L’épopée de jeunes gars rockers, musiciens sur le tas et à l’arrache, originaires du Mans.

Si on aime le rock de voisinage (= français), aucun doute, c’est clairement “le” livre rock paru en 2015. Rien à voir avec les hagiographies de mastodontes (vivants ou morts) pop rock internationaux.

Déjà, superbe maquette, conçue par Patrick Carde, dans l’esprit revendicatif et rebelle de son groupe. Les photos sont positivement terribles, de vrais looks de rockers charismatiques. De multiples tracts et affiches ainsi que les pochettes de disques sont reproduits.

L’auteur, Daniel Paris-Clavel (rédacteur-concepteur du fanzine “ChériBibi”), ne fait pas partie de ND. Ce titi banlieusard du Val-de-Marne a découvert ND au moment où le groupe se séparait, donc en 1989. Hors de question pour lui de s’approprier une histoire qu’il n’a pas vécue lui-même en direct.

Aussi a-t-il recoupé et classé par ordre chronologique les phrases prononcées par tous les interviewés. Des années 1970 à aujourd’hui, de l’enfance des frères Carde et leurs copains à leurs métiers respectifs en 2015.

Daniel Paris-Clavel a effectué un fastidieux travail de retranscriptions (seize heures d’entretiens entre 2010 et 2012). On peut donc lire les interventions parlées de tous les Nuclear Device, de leurs compagnes de l’époque, des membres de leurs familles et des amis proches (Loïc qui les accompagnait en tournée, Étienne Sauvage).

Interviennent aussi : Marsu (du label Bondage, manager de Bérurier Noir), leur réalisateur discographique Jean-Yves Prieur alias Kid Bravo (futur Kid Loco), Dom (du service d’ordre de Bérurier Noir), etc.

Paris-Clavel retranscrit telles quelles, sans enjoliver ni dénaturer, les phrases prononcées par tous les interviewés. Cela donne un côté archi vivant, naturel. Comme si tout ce qui est décrit par les protagonistes était vécu au moment où ils en parlent.

Du début à la fin, pas de langue de bois dans cet ouvrage. Les membres du groupe ne se font pas de cadeaux vis-à-vis d’eux-mêmes et de leurs chansons. Ils autodénigrent presque trop leurs disques, notamment Pascal, trouvant ceux-ci trop froids, mal produits, etc. Marsu pense de même, avec des arguments différents.

Avis (contraire) en tant qu’auditeur de ces chansons depuis 1990 (2) et trop jeune pour avoir pu voir le groupe sur scène : ces versions studio sont excellentes. Elles sont dotées d’un super son, avec une production système D excitante.

“Pretoria”, “Servitude nationale”, “Deprisa (vivre vite)”, “Lettres de fusillés”, “Je suis un évadé”, “Ouvéa”, “Quartiers noirs”, “N°5446”, “Frontière”, “El Gran Corrido”, leur reprise de “Partisans” : leurs chansons parlent directement au cœur et font battre ce dernier.

Ces morceaux vibrent. Il y a de la vie, de l’émotion, une saine énergie communicative. Là-dessus, Kid Bravo (qui ne fait pas partie du groupe) y ajoute de chouettes effets sonores bricolos dub. Ils diversifient l’univers sonore de ND.

À l’inverse, tout en faisant abstraction de la captation sur musicassette (donc avec un son moyen), les versions live figurant sur le CD joint au livre sonnent mal fichues. On y entend un bordel monstre, rien n’est en place. Elles n’ont pas la densité et l’impact des versions studio.

Venant de province, les Nuclear Device n’ont pas les atouts, connexions et avantages des musiciens de Paris. En tout cas au départ, avant qu’ils ne rencontrent l’équipe Rock Radical Records et Bondage.

Au fil des pages, on suit leur parcours. Après les premières répétitions et concerts, ils “montent” à Paris. Ils y découvrent les squats, inexistants au Mans, toute une faune bigarrée.

Puis ce sont les tournées, les galères, les parties de rigolades. Les moments héroïques (entre autres, concerts à l’Elysée Montmartre et au New Morning). Les enregistrements de leurs albums “Tonnerre à la Une !” (1986) et “Western Electric” (1987).

Le doute qui s’installe lorsque Patrick décide de quitter le groupe en 1988, remplacé par leur copain d’enfance Chema. L’arrivée de Mano Negra, autre groupe latino rock : son succès massif et soudain, ses concerts électrochoc. ND se remet alors en question, s’interroge sur ses propres capacités et limites artistiques.

L’ultime disque, “Je suis un évadé” (maxi 45 tours et CD quatre titres), et la séparation peu après un concert à Rome (Italie) en juillet 1989. Et enfin, ce que chacun a fait jusqu’à aujourd’hui dans sa propre vie.

Les ND vivaient au jour le jour ce qui (avec le recul) est la grande aventure artistique et humaine de leurs vies. Avec intensité, hargne, sincérité, fougue et l’habituel manque de moyens.

La lecture de ce livre le confirme : les membres de ND (et leurs proches) sont liés à tout jamais par une amitié indéfectible. Celle-ci a été consolidée par tout ce qu’ils ont vécu dans le mileu de la musique entre 1982 et 1989.

Même les personnes qui ne connaîtraient pas grand-chose au rock (ou à la musique, tout simplement) seront intéressées par la lecture de ce bouquin. Il s’agit avant tout d’un palpitant récit de vie, avec le rock comme moteur de vie.

“45 révolutions par minute – Histoire d’un groupe rock alternatif” est un témoignage capital, fondateur et universel. L’histoire que continuent de vivre des dizaines de milliers de groupes en France et ailleurs. De façon différente, avec aussi une technologie qui n’existait pas dans les années 1980. Mais une histoire similaire, d’une génération à l’autre.

François Guibert
(7 novembre 2015)

(1) : C’est aussi le cas pour Babylon Fighters. Fusion électrochoc reggae rock rap implacable et cuivrée, à l’époque de leur album apogée “Shut Up, Don’t Shutdown” (1991). Sur scène : aussi fracassant et inoubliable que Mano Negra.

Le second 33 tours de Camera Silens, “Rien qu’en traînant” (1987, réédité en CD en 2003), est du rude rock reggae subtil en français. Avec saxophone (élément ici très important). Entre Basement Five, La Souris Déglinguée et... Nuclear Device.

Le maxi 45 tours “Adonde Van”/“Barcelona” de Corazon Rebelde (sorti en 1983) est mauvais, sans pêche, mixé avec les pieds. Le groupe ne joue pas de manière soudée. En revanche, le 33 tours (sorti en 1985) de cette formation mené par Cacho Vasquez est un superbe exemple de compositions latino rock. Il est clair que Manu Chao pillera sans vergogne ce disque (la chanson “Radio Bemba”, au hasard) pour créer le concept Mano Negra en 1987. Comme il s’est fortement inspiré de Chihuahua, le groupe de Napo Romero.

Il faut aussi saluer Human Spirit (“No Pasaran”). Une puissante formation funk’n’roll à tendance afro world reggae beat (1987/1998). Elle est à l’origine de la mouvance funk hexagonale (Malka Family, FFF et leurs descendants).

(2) : premier titre entendu : “Arriba España abajo la dictadura” sur Ado FM en 1990.


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